Essais sur la Seine… Deux films PATHE

Ces deux films très courts sont exceptionnels. L’invention du cinéma Lumière n’a que 8 ans. Ce sont les premiers au monde montrant un aéronef en vol. Pathé-Cinéma réalise ces séquences des deux essais décrits dans le récit précédant.

Le second film montre le crash de l’hydroplaneur « Voisin/Blériot » …!

On peut ainsi imaginez la campagne d’essais sur le Léman quatre mois plus tard…

L’Aérophile – Commentaires juillet 1905 –

1 – en vol plané au dessus de la Seine…

A l’issue du diner du concours du Figaro, M. Archdeacon a fait procéder, le 8 juin 1905, entre les ponts de Billancourt et de Sèvres, à des essais d’aéroplane monté, tracté par un canot automobile.

Le nouvel aéroplane de M. Archdeacon a été construit aux ateliers Surcouf par M. Voisin pour cette nouvelle branche de l’industrie aéronautique. Il a pour principales caractéristiques deux surfaces portantes superposées.

De 10 mètres d’envergure sur deux mètres de large dans le sens de la marche. Leur superficie totale eut donc été de 40 m2, si l’évidement ménagé dans le plan inférieur pour donner place au brancard supportant l’aviateur, ne la réduisait en réalité à 37,40 m2. Un gouvernail de profondeur situé en avant mesure 3 m2 de surface. A l’arrière, se trouvent deux autres plans superposés formant la queue et mesurant 20,60 m2 de surface ; la longueur de l’appareil entier est de 10 mètres et son poids non monté de 220 kilogrammes. Des cloisons réunissent les plans supérieur et inférieur, aussi bien à l’avant qu’à l’arrière ; l’appareil de M. Archdeacon est donc un aéroplane cellulaire à 2 plans porteurs. Tout cet ensemble reposait à la surface de l’eau, sur deux flotteurs en toile vernie ayant chacun 7 mètres de long sur 30 centimètres de large et autant de profondeur. M. Voisin prit place dans l’aéroplane.

Une remorque reliait l’aéroplane au canot la « Rapière », que pilotait M. Tellier fils. Au signal, le canot automobile démarra, entraînant quelques instants à fleur d’eau l’aéroplane, qui s’éleva ensuite d’un bond à 17 mètres de hauteur, planant dans l’air avec une stabilité admirable. L’aéroplane a ainsi parcouru environ 150 mètres. La vitesse du canot était de 40 kilomètres à l’heure et celle du vent de 6 kilomètres à l’heure. Quant au chiffre de traction constaté au dynamomètre, il oscillait entre 55 et 60 kilogrammes. L’appareil pèse 220 kilos; l’expérimentateur, 60 kilos, le câble, long de 30 m. mouillé, 4 kilos, si l’on compte pour 6 kilos le poids de l’eau imbibant les flotteurs, on obtient un poids total de 290 kilos.
Au départ d’un 2eme essai, l’appareil piqua du nez et sous l’effort de cette résistance creva ses flotteurs en même temps que l’amarre cassait. L’aéroplane fut promptement retiré de la Seine quelques minutes après. Il n’avait nullement souffert, et M. Voisin en fut quitte pour un bain forcé.
Dans cette expérience, la première de ce genre, M. Archdeacon avait un double but: substituer aux divers procédés de lancement usités pour les aéroplanes une méthode permettant, comme le lancement par automobiles, de ne plus attendre la bonne volonté du vent, et, en outre, d’expérimenter sans danger pour l’aviateur et sans risque d’avaries irréparables pour le matériel. A ce point de vue il a fort bien réussi.

En second lieu, il s’agissait de voir comment se comporterait dans l’atmosphère un aéroplane à deux surfaces, modifié par l’adjonction de cloisons transversales qui le transforment en un véritable cerf-volant du type Hargrave. La stabilité de l’appareil ainsi transformé fut incomparablement meilleure.

 

L’Aérophile – commentaires Juillet 1905

2 – Crash au dessus de la Seine …

Ces intéressants essais ont été renouvelés au même endroit le 18 juillet. Cette fois il y avait deux appareils : le Archdeacon/Voisin, déjà décrit, et dont les flotteurs primitifs avaient été remplacés par d’autres plus lourds, mais plus solides, et un nouvel aéroplane Voisin/Blériot, un membre militant de l’Aéro-club de France. L’aéroplane a la même disposition générale que le premier, mais il est de dimensions plus réduites.
L’envergure des plans sustentateurs avant est de 7 m., leur surface de 29 m2 leur distance verticale de 1 m. 50 ; d’autre part, la courbure des surfaces portantes dans le sens antéropostérieur est beaucoup plus accentuée que dans l’aéroplane Archdeacon/Voisin (courbure maxima à peu près au tiers avant, avec flèche de 1/12 de la longueur des nervures) et les deux cloisons extrêmes, réunissant le plan supérieur au plan inférieur, sont obliques au lieu d’être verticales.

Après des essais préliminaires dans la matinée, les expériences publiques eurent lieu l’après-midi. L’appareil de M. Archdeacon/Voisin fut essayé le premier, monté par M. Voisin. Tiré par le canot automobile Antoinette, il s’élève à 4 ou 5 m. au-dessus de l’eau et après un parcours évalué à 300 m. environ, revient se poser à la surface de la Seine lorsque le canot a stoppé. Il est bon de noter que, dans ce parcours, l’appareil a plusieurs fois repris le contact de l’eau et que des remous aériens latéraux avaient tendance à le faire incliner sur la gauche. De ce que l’appareil s’éleva moins haut que le 8 juin, il ne faut pas conclure à un résultat inférieur, l’idéal étant au contraire de planer le plus horizontalement possible, avec l’incidence minima.

L’aéroplane Voisin/Blériot fut ensuite essayé de la même manière. Il s’enleva à peu près à la même hauteur que le précédent, mais sous un effort de traction moindre et avec une incidence plus faible, ce qui semblerait indiquer des qualités sustentatrices supérieures, attribuables, de l’avis même de M. Archdeacon, à une meilleure courbure des surfaces portantes. En revanche, l’équilibre transversal de cet appareil parut moins assuré, après un premier bond dans de bonnes conditions, il donnait de la bande, tantôt à droite, tantôt à gauche, se redressant dès que l’un des flotteurs venait à toucher l’eau. Finalement, une embardée plus accentuée que les autres fit pénétrer dans l’eau l’extrémité gauche de la surface portante inférieure; sous l’effet de cette soudaine résistance supplémentaire, l’embardée s’accentue, l’aéroplane décrit un tour complet autour de son axe de translation et s’enfonce brusquement, la surface inférieure la première. M. Voisin, qui a disparu avec l’appareil, reparaît après quelques instants et regagne à la nage un des canots qui s’avançaient à son secours. La durée de l’expérience fut de 30 secondes, ce qui à raison de 6 mètres à la seconde, donne un parcours total de 180 m. L’appareil fut renfloué dans la soirée. Ces expériences instructives seront continuées soit sur la Seine, soit peut-être sur un lac. Dans ce dernier cas, l’expérimentateur n’aurait plus à craindre, en s’élevant trop haut, de se voir entraîné vers les obstacles des berges par une déviation subite de la route sous l’effet d’un coup de vent de côté.

Maintenant que les essais préliminaires ont démontré l’intérêt de la méthode, il serait à souhaiter de voir l’analyse de l’expérience faite d’une façon plus précise, par des chronométrages parfaitement organisés, au moyen d’appareils qui en enregistreraient les divers éléments utiles à connaître et qui fourniraient aussi des bases d’enseignement plus solides que les appréciations individuelles et dont la diversité même suffit à prouver l’insuffisante approximation.